Monday, October 6, 2008
LES AMBITIONS DEMESUREES DE NKUNDA MAHINGO
Laurent Nkunda
Les derniers propos du rebelle congolais, Laurent Nkunda sont sans équivoque : il est décidé à transformer la lutte menée jusque-là en un vaste mouvement de libération nationale.
De là, penser qu’il caresse le désir de remplacer Joseph Kabila à la tête de la RDC, le pas est vite franchi. Mais le pourra-t-il vraiment ?
Par ses actions d’éclats et ses propos alarmistes, Nkunda montre en tout cas que l’imbroglio congolais n’en finira jamais de nous rappeler à sa pénible existence. Chaque jour qui passe illustre jusqu’à quel point les fils et filles de ce vaste territoire ont des difficultés à trouver le compromis susceptible de les conduire vers un consensus national. Ils ont pourtant la lourde charge de bâtir ensemble le pays de leurs ancêtres. Si le Congo est un scandale du point de vue des richesses naturelles, ses enfants eux, ont achevé de nous convaincre qu’ils sont complètement perdus dans cet univers paradisiaque où chacun se prend désormais pour le nouveau messie.
Qu’est-ce qui peut bien trotter dans la tête du protégé de Kigali en même temps adversaire résolu des "outlaws" Banyamulengué qui arpentent depuis des années la forêt congolaise ? Cherche-t-il par ses menaces ouvertes de déstabilisation, à se faire admettre comme force de négociation, lui qui a des dossiers compromettants au niveau de la justice internationale ? Serait-ce une stratégie concoctée avec le président Kagamé qui a aussi des démêlés avec la justice internationale ? La RDC semble-t-elle partie pour une guerre totale en dépit même de la présence des forces onusiennes ? On a surtout le sentiment que l’ex-général cherche à exploiter à son profit exclusif le contexte qui est présentement défavorable à Kabila fils.
A l’interne, l’héritier de l’autre Laurent, Kabila père en l’occurrence, a du mal à trouver la pleine stabilité dans sa gestion du pays. La nomination puis le départ du vieux lumumbiste Gisengue nous semblent à ce point traduire un certain malaise. Les ennuis créés au leader de l’opposition M. Mbemba auprès de La Haye ne sont pas non plus pour faciliter les choses. En relançant la mobilisation de ses militants ce week-end à Kinshasa, ses partisans ont peut-être voulu démontrer que son éloignement ne signifie nullement une quelconque forme d’hibernation. Autant dire que l’ex-général Nkunda devra compter avec cette autre force politico-militaire qui est loin de s’avouer vaincue. Les partisans de Mbemba ont non seulement l’expérience de la lutte armée, mais en plus, ils ont su tisser et préserver des relations au plan international. De même, au niveau local, ils occupent le terrain politique et savent se trouver des alliés où il faut, pour déranger la quiétude de Joseph Kabila.
La gestion de l’ancien Zaïre est vraiment loin d’être aisée. Longtemps demeuré dans le désordre et la misère après la période Mobutu, ce pays souffre encore des problèmes récurrents avec la Belgique, son ancienne puissance coloniale. Par ailleurs, les amitiés avec la France ont pris un coup de froid ces derniers temps, Paris ayant du mal à digérer la proximité des rapports que Kinshasa entretient avec Pékin. Mais le plus inquiétant, c’est outre la détermination, l’optimisme avec lequel le rebelle congolais Nkunda affiche cette fois-ci ses ambitions. Il semble si sûr de lui qu’on est en droit de se demander de quels appuis il bénéficie réellement au double plan national et international ? Comment parvient-il à financer son armement et ses services de renseignements ?
Certes, la zone qu’il contrôle est très riche en minerais. Toutefois, outre les revenus tirés de l’exploitation des ressources naturelles, il faut pouvoir disposer de logistiques et surtout de relations solides pour pouvoir inquiéter un régime établi depuis bien longtemps avec toutes sortes de liens. De plus, le consensus brodé autour de Kabila par les différents courants dont celui des mobutistes a certainement permis au chef de l’Etat congolais d’enrichir son carnet d’adresses. Il est vrai que par les temps qui courent, marchands d’armes et autres acheteurs de consciences n’ont pas d’état d’âme. Ils sont bien capables de pourvoir simultanément aux besoins de camps opposés, l’argent constituant le seul mobile de leurs actes.
D’autres tentatives de sécession seront-elles en vue ?
Il y a comme un supplément d’assurance lorsque le mouvement se mue en formation politique.
Les ambitions politiques sont claires. Nkunda cherche à rallier à lui tous les mécontents du régime Kabila. Il voudrait sans doute râtisser large et exploiter le mécontentement populaire pour espérer renverser Kabila fils. Ce dernier semble encore prisonnier des liens tissés entre son père et ses anciens alliés.
En effet, Nkunda estime que Kabila "a trahi" le peuple congolais. A la tête du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP) qui combat depuis le 28 août dernier les forces armées nationales dans les collines du Nord-Kivu dans l’est du pays, il entend lutter "jusqu’à la libération du peuple". Ces combats se déroulent en violation du cessez-le-feu consécutif à l’accord de paix de Goma, la capitale provinciale, signé en janvier dernier.
Nkunda dit avoir décidé de transformer son organisation en "un mouvement de libération totale de la République".
Les observateurs doutent cependant que Nkunda soit en mesure de réaliser cet objectif au plan militaire. Sa personne pourrait difficilement rallier à elle tous les contestataires du régime, notamment ceux de l’ouest de la RDC. On lui reproche d’avoir surtout centré ses combats dans sa zone de prédilection en cherchant plutôt à défendre les intérêts de la communauté tutsi dont il est membre.
Cepndant son appel tombe à pic, le régime de Kabila fils étant affaibli tant à l’intérieur qu’à l’extérieur. L’évolution de la situation a beaucoup inquiété la communauté internationale qui se lasse sans doute de voir Kinshasa faire la preuve de son incapacité à résoudre les problèmes.
Presque partout on remarque des fissures dans la toile congolaise. Dans l’Ituri, des miliciens auraient entrepris de se réarmer. Au Kivu même, les forces onusiennes ont maille à partir avec les deux camps. Le gouvernement lui reproche de ne pas s’impliquer dans le combat à ses côtés et du côté des rebelles, on dénonce plutôt une forme de partialité. Pour Nkunda, "le gouvernement en place a favorisé l’occupation du Congo par les forces négatives étrangères".
Malade de son gigantisme, la RDC vit de plus en plus un climat lourd d’incertitudes. Tôt ou tard, il faudra instaurer un dialogue entre les trois camps : Kabila fils, MBemba et Nkunda. C’est sans doute ce que Nkunda a compris et en proclamant haut et fort ses intentions, il cherche à mieux se positionner pour ne pas tomber dans l’escarcelle de l’oubli dans les négociations qui s’avèrent incontournables si les partenaires de la RDC veulent bien donner une chance à ce pays. Une autre table ronde après celle de l’indépendance et celle qui a confirmé Kabila au pouvoir ?
Ce n’est pas à exclure, même si comme le déclare le patron de l’UE, M. Louis Michel, le régime Kabila a été démocratiquement mis en place et qu’il faudrait éviter de le faire désarçonner par des voies non constitutionnelles.
"Le Pays"
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NKUNDA FAIT APPEL AU SOULEVEMENT POPULAIRE CONTRE LE REGIME DE KINSHASA
Il appelle au soulèvement contre Kinshasa en faisant référence à d'autres mouvements de contestation. Mais son passé le confine dans l'est du Congo.
La Mission de l'Onu en République démocratique du Congo (Monuc) a "fermement" condamné samedi l'appel du chef rebelle Laurent Nkunda demandant aux Congolais de "se mettre debout" contre le gouvernement de Kinshasa. "La Monuc et la communauté internationale ne tolèrent pas cette nouvelle tentative de déstabiliser le processus politique", indique un communiqué reçu à Bruxelles. La Mission onusienne a également condamné "avec fermeté" toute tentative visant à "attiser les tensions en prônant une solution militaire au conflit dans les Kivu".
Des combats opposent depuis le 28 août le Congrès national pour la Défense du peuple (CNDP) du général déchu Laurent Nkunda aux Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) dans les collines du Nord-Kivu, en violation d'un cessez-le-feu découlant de l'accord de paix de Goma, signé le 23 janvier 2008. Tutsi congolais, Laurent Nkunda a appelé, depuis jeudi sur plusieurs chaînes de radio étrangères, tous les Congolais "à se mettre debout contre un gouvernement qui a trahi son peuple" et a affirmé la détermination de son mouvement de "porter sa lutte jusqu'à la libération du peuple".
Samedi, sur les antennes de la RTBF-radio, Laurent Nkunda a justifié sa décision par la "trahison du peuple par le gouvernement de Kinshasa". "C'est une trahison; les preuves sont claires. Un gouvernement qui arme les forces négatives étrangères contre son peuple, un gouvernement qui forme une armée qui se comporte très mal contre son peuple, un gouvernement qui ne répond à aucune revendication de son peuple, mais c'est une trahison", a-t-il affirmé pour expliquer pourquoi il avait (re) pris les armes contre le régime du président Joseph Kabila.
Jeudi, il avait annoncé la transformation de son mouvement, le Congrès national pour la Défense du Peuple (CNDP), en un "mouvement de libération totale de la République", dans l'espoir d'être rejoint par d'autres opposants. "Aujourd'hui, la menace est devenue nationale, (elle) commence à devenir générale", a-t-il déclaré. Et Laurent Nkunda de citer la répression contre les adeptes de la secte politico-religieuse Bundu dia Kongo (BDK), en février-mars dans la province du Bas-Congo (ouest) - 27 morts selon les autorités, une centaine, selon une enquête de l'Onu et la société civile -, les "représailles" contre l'ancien vice-président Jean-Pierre Bemba - des combats qui ont fait jusqu'à 500 morts dans la capitale, Kinshasa, en mars 2007 - et la situation tendue dans les provinces Orientale (nord-est) et du Katanga (sud-est).
L'armée congolaise a balayé cette menace. "Compte tenu de l'affaiblissement de ses forces en raison de nos opérations, je me demande comment il compte libérer l'ensemble du pays", s'est contenté de commenter le colonel Delphin Kahimbi, commandant de l'armée congolaise au Nord-Kivu. (D'après AFP et Belga)
La Libre
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