Wednesday, February 27, 2008

AVONS - NOUS UN GOUVERNEMENT POUR LA PROTECTION DE SES AGENTS?

L'incidence de Lubumbashi : l’Etat désacralisé

Le Potentiel

La population congolaise est en émoi. Un ministre en mission a failli être lynché par les partisans d’une « autorité provinciale », en désaccord avec la hiérarchie de son parti. Aucune réaction officielle spontanée de la part du gouvernement devant cet acte de flagrance qui désacralise indubitablement l’autorité de l’Etat. Comme si c’était encore un autre fait divers. Que non !

Edouard Kabukapua, ministre des Affaires foncières, a eu des sueurs froides le lundi 25 février, à son arrivée à Lubumbashi. A l’hôtel où il est descendu, le Park Hôtel précisément, des milliers de militants de l’Unafec - Kyungu wa Kumwanza, président de l’Assemblée provinciale du Katanga, tenaient à lui faire la peau.

Son malheur, c’est d’appartenir à l’Unafec- Kisimba Ngoy, jusque-là président national de ce parti, mais en conflit ouvert avec son ex-vice-président Kyungu wa Kumwanza. Pour les militants de Kyungu wa Kumwanza, ce poste leur revient. En séjournant à Lubumbashi, le ministre se trouvait en « zone adverse » et devrait payer de son audace, subir les conséquences de cet affront. N’eût été l’intervention du gouverneur de la province du Katanga et des responsables de la Police, un malheur serait vite arrivé. D’ailleurs, pour disperser la foule, les services de l’ordre et de sécurité ont dû faire usage de leurs armes. C’est dire que la tension était vive.

UNE FLAGRANCE

Mais la question qui vient immédiatement à l’esprit est celle de savoir, que serait-il arrivé si le député et président national de l’Unafec, Me Kisimba Ngoy, avait effectué en personne le déplacement ? Il y aurait eu mort d’hommes aux conséquences incalculables. Cependant, la gravité de cet incident de Lubumbashi réside en ce fait qu’un ministre du gouvernement central en mission officielle vient d’échapper à un lynchage. Pire, le présumé commanditaire de ce « commando » pour une expédition punitive ne serait autre qu’une autorité politique régionale. Par surcroît, le président de l’Assemblée provinciale, le prolongement de l’Assemblée nationale, institution en charge de l’édiction des lois de la République. Une personne supposée être sage, pondérée, un modèle de société en possession de toutes ses facultés intellectuelles et morales.

Certes, les différends politiques sont légion. Il arrive souvent qu’au sein d’un même parti, des voix divergent, allant jusqu’à la scission. Mais pousser jusqu’à porter atteinte à l’intégrité physique d’une personne, au plus haut point de la hiérarchie politique, un ministre du pouvoir central, c’est désacraliser ni plus ni moins l’autorité de l’Etat. Ce qui vient de se passer à Lubumbashi impose une réunion urgente de la part du gouvernement pour saisir immédiatement le président de la République en vue d’une réaction appropriée. Parallèlement, l’Assemblée nationale et le Sénat devraient aussi se saisir de ce cas, toutes affaires cessantes, pour se réunir en congrès dès la prochaine rentrée parlementaire en vue de proposer des sanctions au président de la république, seul constitutionnellement habilité, à se prononcer sur les violations commises au niveau des entités provinciales. Entre-temps, les Cours et Tribunaux, saisis du différend Unafec, de siéger en matière de flagrance afin de dire la loi dans toute sa rigueur.

EFFET BOULE DE NEIGE

La gravité de l’incident de Lubumbashi mérite une réaction immédiate et adéquate. Il ne s’agit nullement d’un autre fait divers que l’on classerait sans suite, comme d’autres cas précédents commis dans les mêmes circonstances de temps et de lieux, lesquels ont porté un coup dur au crédit et terni l’image de l’Etat.

Le danger, dans la légèreté de la gestion de cet incident, c’est qu’il pourrait y avoir des effets boule de neige. En effet, il est inconcevable, au moment où tout le monde, y compris les partenaires extérieurs s’emploient à restaurer l’autorité de l’Etat sur toute l’étendue du territoire, en ciblant en ces instants précis le grand Kivu et l’Ituri, qu’au Katanga l’on se mette en exergue par des actes et un comportement qui frisent le sécessionnisme.

Le danger, une fois de plus, c’est quand on s’emploie à neutraliser les « forces négatives, les groupes armés et les milices » au Kivu et en Ituri, il se crée d’autres « milices » au Katanga à l’initiative d’une autorité établie. Tel comportement est préjudiciable au bon fonctionnement des institutions tant nationales que provinciales, et s’érige en obstacle en plein milieu du processus politique en République démocratique du Congo.

Voilà pourquoi le gouvernement de la République doit briser illico presto le silence et engager la procédure y afférente dans le but bien indiqué de faire respecter les institutions de la République. Car, presqu’aux mêmes instants, dans la province du Bas-Congo, la sonnette d’alarme vient d’être tirée. L’autorité de l’Etat est bafouée par une secte religieuse qui outrepasse les limites de toute vocation spirituelle pour se substituer à l’Etat, si pas tout simplement en « bande rebelle ». Les derniers témoignages en provenance de cette province sur des horreurs, des violences, des actes inciviques commis dans les districts de Luozi et de Seke-Banza par les adeptes de cette secte, placent le gouvernement central au pied du mur. Bien plus, en établissant un lien avec cet incident de Lubumbashi, ces faits, dirions-nous, consacrent progressivement la désacralisation de l’autorité de l’Etat. Péril est en la demeure.


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