Snel, gros risques de rater le marché sud africain
Le Potentiel
La consommation en courant électrique en Afrique du sud a explosé le plafond de 40.000 mégawatts disponibles. L’opérateur local s’en trouve dépassé. L’option nucléaire retenue, n’exclut nullement le recours au potentiel disponible en RDC. Pendant ce temps, la Snel, qui gère le complexe d’Inga, semble ne pas saisir l’opportunité, préoccupée par autre chose. Loin d’un management visionnaire.
La première économie du continent est en difficulté. L’explosion de la demande en courant électrique l’oblige de recourir à d’autres sources, notamment le nucléaire. Cette option prendra du temps. Elle est de plus en plus sujette à controverse à cause de l’impact négatif sur l’écologie.
Et pourtant, dans le cadre du Nepad, le site d’Inga a été retenu pour l’intégration régionale dans le secteur de l’électricité. Présentement, les fonds sont disponibles en vue du financement des travaux de construction de Inga 3, puis à échéance le Grand Inga, avec à la clé une production de plus de 44.000 mégawatts.
Ce surplus de production pourrait ainsi satisfaire la demande sud-africaine, à la condition que la partie congolaise prenne conscience et se mette résolument au travail dans la perceptive d’atteindre cet objectif. Les retombées financières du Grand Inga sont estimées en terme de milliards de dollars américains. La RDC a ainsi un important rendez-vous à tenir dans le cadre de l’intégration régionale.
UNE OPPORTUNITE A SAISIR
Face à l’accroissement exponentiel de la demande, l’Afrique du Sud compte expérimenter le rationnement de fourniture du courant électrique. Cela pendant plusieurs années. L’opérateur local est dans l’incapacité de supporter seul cette nouvelle exigence.
A la suite des coupures intempestives, des dégâts énormes ont été enregistrés. Eskom est soumis au versement des dommages et intérêts. D’où la mise en place d’un système de délestage comme en RDC.
Selon Nelisiwe Makubane, directrice générale adjointe du ministère de l‘Energie et des Minéraux, citée par l’agence angolaise de presse, «cette réglementation, préparée avec la compagnie publique d‘électricité Eskom, pourrait entrer en vigueur dans les trois mois».
Le danger que courent les investissements étant réel, d’autant qu’Eskom est d’avis qu’il est insensé «de lancer de gros projets industriels tant que la situation ne se sera pas améliorée, soit pas avant cinq ans». Déjà les pertes se chiffrent à hauteur de plus de deux milliards de rands (280 millions USD/200 millions EUR).
La situation, soutient le directeur de l’organisation représentative des entreprises (Busa), Jerry Vilakazi, «réduit la compétitivité mondiale du pays en matière d‘investissements, notamment parce qu‘elle affecte son image de pays doté d‘une électricité à bas coût.
Cette opportunité devrait être saisie par la Snel, par voie de conséquence la RDC. Les accords signés dernièrement par la RSA et la RDC à Kinshasa concernent aussi le domaine énergétique. Il est temps de les activer afin de garantir à l’Afrique du Sud un courant écologiquement propre. Les milliards de dollars à engranger seront à même de soulager le budget national.
Pour ainsi dire, la source la plus proche capable de résorber la demande sud-africaine reste Inga. La poussée de cette consommation avec de nouveaux investissements laisse penser que le potentiel peut encore servir ceux qui en ont grandement besoin.
La plus grande crainte serait que la Zambie qui a saisi le bien-fondé de développer ses capacités en cette matière, dame le pion à la RDC. Et pour cause ! Depuis l’année dernière, la Zambie a entrepris de se doter des sources de production d’électricité susceptibles de servir non seulement à sa demande locale mais aussi à celle des pays étrangers. Les Zambiens eux sont allés loin jusqu’à lorgner du côté des miniers congolais.
REVIVIFIER LE PROJET WESTCOR
Projet d’intégration sous-régional de la zone Sadc pour la production et le transport de l’énergie électrique, Westcor, western power corridor en anglais, c’est-à-dire Corridor ouest de l’énergie, implique cinq sociétés nationales d’électricité de cinq pays de la sous-région Afrique australe, à savoir la République démocratique du Congo (Snel), l’Angola (Ene), la Namibie (Nampower), le Botswana (Bpc) et la République sud-africaine (Eskom).
En tant que tel, le projet Westcor est l’un des projets prioritaires aussi bien de la Sadc, organisation sous-régionale, que du Nepad (Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique). Il consiste à construire la centrale Inga 3 en RDC et une ligne de transport Très Haute Tension (THT), afin de drainer une bonne partie de l’énergie ainsi produite en Rdc vers les autres pays.
Une société de gestion mixte, avec un capital initial de 500.000 Usd, a été créée (genre Sinelac) à parts égales (20% pour chaque pays, soit 100.000 Usd).
Son siège est à Gaborone (Botswana), l’Angola en assure la présidence, le poste de directeur général revenait à la RDC avec M. Lokala J’Ifaso Isongole Jean Thomas, ancien directeur de production et de transport à la Snel, en poste depuis le 1er mai 2006. Il est actuellement confirmé ADT de la Snel..
Westcor a été retenu comme projet prioritaire du Nepad, avec un financement de 4,7 milliards de dollars pour les travaux d’Inga III, soit 3,7 milliards Usd pour la centrale et un (1) milliard Usd pour la construction de la ligne.
Au terme des travaux qui dureront 4 ans, Inga III aura une puissance de 4.000 mégawatts, soit 10% d’un site possédant un potentiel de 44.000 mégawatts. Au tarif d’aujourd’hui, il va générer des recettes annuelles de 500 millions Usd. Complètement outillé, le site d’Inga peut donc générer 5 milliards Usd chaque année.
UN MANAGEMENT VISIONNAIRE
Il est vrai que la Snel est butée à des difficultés réelles de production sur le site d’Inga. Des solutions sont à portée de la main, malheureusement, un déficit de management courageux et visionnaire ne rassure personne. C’est peut-être le lieu de compter sur le partenariat de gestion annoncé par la ministre du Portefeuille dans le deuxième trimestre de l’année 2008.
Des observateurs estiment cependant qu’actuellement, la Snel est en mesure de garantir le minimum à la demande interne voire l’exportation vers l’Afrique australe estimée à 1.700 mégawatts.
Au lieu de rassurer les partenaires venus à la rescousse, la main politique, toujours à la recherche des commissions, téléguide des actions de sape afin de se choisir les partenaires «les plus coopératifs». Le potentiel d’Inga peut ainsi constituer une source sûre de devises pour la RDC, pourvu que le gouvernement donne l’impulsion qu’il faut à la Snel au lieu de se précipiter sur la voie de la privatisation.
Le management visionnaire voulu pour la Snel doit également intégrer la donne Banque mondiale. Ainsi, au-delà des promesses non tenues jusque-là, pour des raisons compréhensibles, par cette institution financière internationale, il faut appréhender l’insidieuse volonté de mettre à genoux cette unité de production afin de mieux la dépecer à l’instar de la Gecamines.
Une vision à long terme a le mérite de créer de nouvels sources de revenus avec le concours des partenaires habités par la volonté de conclure des accords «gagnant-gagnant», en même temps que de se mettre réellement au service des populations congolaises.
La RDC doit cesser de se confiner à une dimension qui n’est pas la sienne, revoyant sensiblement à la baisse ses ambitions. Les gestionnaires occidentaux qui viendront ne feront pas des miracles. Les congolais visionnaires, il n’en manque pas à la Snel. Ils existent et avaient fait leurs preuves dans le passé.
Il suffit de bien scruter pour ne pas offrir sur un plateau, cette poule aux œufs d’or à des étrangers, simplement pour donner satisfaction aux chasseurs de commissions tapis dans les hautes instances de décision de l’Etat.
BIENVENU-MARIE BAKUMANYA
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