Friday, December 14, 2007

APRES LE CINGLANT REVERS DES FARDC: NKUNDA OPPOSE UN DEMENTI A KABILA

Guerre des nerfs à l’Est / Après le cinglant revers des FARDC à Mushaki: Confortablement installé aux portes de Goma, Nkunda oppose un démenti catégorique à Kabila
(Le Révélateur 14/12/2007)

Les troupes insurgées ralliées au général déchu Laurent Nkundabatware poursuivaient jeudi 13 décembre leur campagne vers la ville de Goma, aux portes de la quelle elles sont signalées, selon la MONUC. ‘‘Il y a des tirs depuis ce matin (jeudi) entre la 2ème brigade des FARDC et des troupes de Nkunda commandées par le colonel (Sultani) Makenga sur les hauteurs de Gungu (à 24 km au Nord de Goma, ndlr)’’, a déclaré le porte-parole militaire de la MONUC au Nord-Kivu, le major Prem Tiwari.

A Goma, la peur est sur toutes les figures. De même qu’à Katale, dans le territoire de Masisi où la tension reste perceptible après que le bouclier armé qui a fait ses preuves lors des combats précédents ait été évacué plus au nord-ouest vers Masisi-centre. La ville peut tomber d’un moment à l’autre, craignent ses ressortissants arrivés à Masisi-centre et qui affirment le rapprochement des détonations.

‘‘Qu’elle rentre dans ses habitations, il n’y a rien à craindre, la situation est sous contrôle… Il n’y a pas d’ennemi à Katale, ce sont des rumeurs et nous savons qui orchestre ces rumeurs à Goma et à Kinshasa… Nous ne sommes pas nécessairement dans Katale mais il faut se trouver sur les hauteurs qui dominent Katale’’, rassurait le Chef d’Etat-major général, le lieutenant général Kayembe. Les FARDC concentrent l’essentiel de leur force autour de Goma et de Sake, désormais défendus par des Casques bleus, qui ont prévenu qu’ils ouvriraient le feu en cas de tentative de progression des insurgés.

Galvanisé par son dernier fait de guerre, Nkunda avance inéluctablement sur Goma. Il exige désormais de s’asseoir sur une même table des négociations avec le gouvernement qui a perdu la face depuis les derniers revers subis par les FARDC à Mushaki. C’est cette position de force qu’il affiche comme argument valable à sa requête. Ce verrou très important sur la route de Kitchanga, fief des Nkundistes, avait cédé après une riposte foudroyante le lundi 10 décembre lancée par les éléments du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP), mouvement politico-militaire de Nkunda. Acculé à l’époque à prendre la route de l’exil sud-africain, Nkunda relève aujourd’hui la tête pour regarder en face le gouvernement et lui exiger des concessions.

La sécurité du Kivu encore attendue

‘‘Le Gouvernement est déterminé à tout mettre en œuvre pour rétablir rapidement et durablement la paix et la sécurité. Dans les deux territoires encore troublés du Nord Kivu. Je compte pour cela sur la bravoure des Forces Armées de la République Démocratique du Congo. Dans des conditions extrêmement difficiles, elles accomplissent honorablement leur mission’’. Le président de la République, Joseph Kabila avait promis, lors du discours de l’an 1 de son mandat de tout mettre en œuvre pour débarrasser cette partie du pays des forces négatives, notamment les insurgés de Nkunda. En moins d’une semaine, il s’est fait démentir.

Toute l’armada des FARDC n’a pas eu raison de Nkunda qui procède par guérilla. Là où les FARDC doivent trimbaler un lourd matériel de guerre efficace dans les bombardements massifs loin de toute population civile, Nkunda utilise des petits groupes hyper mobiles pour mener des actions d’éclats. L’armée accuse des pertes dans ses rangs, notamment en matériel lourd et coûteux que les insurgés récupèrent sans coup férir.

En plus Nkunda fait pression sur des populations civiles amassées à Kiroliwe à garder leur position afin de servir de bouclier humain ou de servir de chair à canon, ce qui serait une occasion de crier à nouveau au génocide. C’est en attendant les négociations tentant à les évacuer de cette cible que les FARDC se sont faites surprendre à Mushaki. Aujourd’hui, la promesse de la paix est revenue à la case départ pour des milliers des Kivutiens qui doivent s’entasser dans des camps, mais aussi pour ceux vivant à Goma et Sake, menacés en permanence par la campagne du général tutsi.

Le gouvernement et la MONUC rassurent

Arrivés à Goma après la perte de Mushaki, l’armée a rassuré la population sur la stabilisation de la situation. Sake ne tombera pas, Rutshuru non plus et encore moins Goma. Foi du général de brigade Kitenge qui a accompagné le ministre de la Défense, Tshikez Diemu et le général Kayembe mercredi 12 décembre à Goma.

Rutshuru comme Goma sont fermement tenues par les troupes loyalistes, a ajouté le général, avec l’appui de la MONUC, a précisé le représentant du Secrétaire général de l’ONU en RDC, William Lacy Swing. La MONUC utilisera ‘‘tous les moyens dont elle dispose, en étroite collaboration avec les FARDC, afin de défendre les villes de Saké et de Goma et d’empêcher les dissidents de Nkunda de progresser’’, a rassuré Swing. ‘‘Il est important que la population du Nord-Kivu garde son calme et ne prête pas attention aux rumeurs’’, a-t-il souligné.

Situation humanitaire chaotique

Avec 1,3 millions de déplacés intérieurs dont 529 000 nouveaux cas au cours des six derniers mois et 28 000 dus aux catastrophes naturelles, 35 femmes violées par jour, etc., l’échec de l’armée à circonscrire l’avancée de Nkunda exacerbe une situation humanitaire déjà chaotique en RDC. Les dernières violences ont jeté encore plus de monde dans les routes. A Masisi-centre, l’arrivée des militaires FARDC venus de Katale a semé la panique dans la ville et les humanitaires ont enregistré des mouvements des habitants vers les localités de Lwashi, Bugabo, et Kaanja. La situation de tension joue également sur les approvisionnements.

La pénurie de denrée de première nécessité commence à se faire sentir autour de Goma voire jusqu’à Bukavu. Selon les commerçants de la région, elle s’est aggravée depuis que la route de Masisi est devenue peu sûre. D’où une flambée générale des prix des denrées alimentaires. Pour pallier au chaos très prochain, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA) a lancé un appel à contributions pour 2008 pour la RDC d’un montant de USD 575 millions, dont 30% iront aux efforts au Nord-Kivu. D’autre part, le Programme alimentaire mondial (PAM) a distribué de la nourriture à quelque 3.000 familles de personnes déplacées au camp de Kibumba. Dix mille autres familles sont en attente.

Au regard de ce climat, les agences redoutent une recrudescence des viols. Entre janvier (début des attaques de Nkunda) et octobre 2007, dans la seule région du Nord-Kivu, 2.700 cas de viol avaient été signalés.

La crainte s’aggrave à nouveau sur l’enrôlement des enfants soldats. La MONUC a lancé a dénoncé l’opération dans le camp des Nkundistes. ‘‘La MONUC continue de relever le recrutement et le re-recrutement souvent forcé d’enfants, dont l’âge varie entre 13 et 18 ans, au sein des troupes du Congrès national pour la défense du peuple’’ du général déchu Nkunda, a déclaré mercredi 12 décembre son porte-parole, Kemal Saiki.

Considéré comme ‘‘crime de guerre et crime contre l’humanité’’, le recrutement de mineurs se poursuit devant les écoles, notamment à Burungu ou à Kitchanga, bastions de Nkunda, a-t-il dénoncé. Parmi les recrues du CNDP figurent également ‘‘des enfants rwandais, d’origine tutsie, récemment sortis des groupes armés’’, a précisé Saïki.

Les exactions des forces du CNDP font l’objet d’une enquête de la Cour pénale internationale (CPI).

Le Révélateur


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