Monday, December 3, 2007

LE PRESIDENT FRANCAIS EN ALGERIE


Algérie: Sarkozy aujourd'hui à Alger

La Tribune (Algiers)
3 Décembre 2007

Quelle alternative au traité d'amitié ?

Au moment même où le ministre français des Affaires étrangères affichait, en présence de son homologue algérien, la volonté de faire de l'Algérie un partenaire important, «un pays frère», le secrétaire d'Etat aux anciens combattants Marleix apportait, à Perpignan, la caution publique du gouvernement français à l'entreprise par les milieux proches de l'OAS d'ériger un «mur des disparus» stigmatisé par les associations de défense des droits de l'Homme comme un «mur de la honte».


Si le responsable de la diplomatie française plaidait, dans une formule toute mitterrandienne, de laisser du temps au temps dans le traitement des questions du passé colonial, son collègue ne parlait pas moins que d'«une mémoire assumée», dont la charge revancharde ne pouvait échapper à ceux qui suivent l'évolution des relations algéro-françaises. L'expression publique de ce qui s'apparente bien à un grand écart informe-t-elle aussi sur les incertitudes des choix de la France dans ses rapports avec l'Algérie ? En dépit du ton délibérément rassurant du chef de la diplomatie algérienne, en déplacement à Paris la semaine dernière, ou encore des visites de travail échangées, rien ne semble décanter sérieusement les contours de ce que Nicolas Sarkozy avait présenté lors du premier déplacement en Algérie en qualité de chef de l'Etat, comme «un partenariat d'exception».

En fait, la seule certitude notable est qu'effectivement «le traité d'amitié» imaginé par le président algérien et le prédécesseur de Sarkozy est bel et bien enterré et, dès lors, se pose la question de savoir quelle alternative le nouveau président français pourrait bien avancer pour, à tout le moins, une clarification des relations entre son pays et l'Algérie dont il ne peut ignorer qu'il n'est -y compris pour des raisons qui tiennent à l'histoire- ni le Maroc ni la Tunisie. L'antienne sur le caractère «passionnel» et/ou «tourmenté» des relations entre les deux pays ne peut pas servir indéfiniment, et le moins que l'on puisse relever est que la campagne présidentielle française, suivie avec l'attention qu'on imagine à Alger, n'a rien fait pour conforter l'apaisement des mémoires et le traitement plus serein du contentieux colonial.

Le discours de Toulon du candidat Sarkozy sur la repentance, les engagements pris auprès d'associations de rapatriés n'auront pas à l'évidence échappé aux autorités algériennes, dont on ne peut d'ailleurs que relever qu'elles ont fait le choix de ne pas attiser le feu de la discorde, faisant visiblement le pari que les intérêts des Etats finiront par primer sur des engagements de conjoncture. Autrement dit, la balle paraît tout à fait dans le camp de Nicolas Sarkozy et on peut tenir les rappels du ministre algérien des Affaires étrangères Medelci, lors de son déplacement à Paris, pour un SMIG diplomatique, qui portent, entre autres, sur la question des visas et sur l'état de coopération économique. L'insatisfaction algérienne quant au niveau d'investissements français en Algérie n'est pas neuve et il est notable que celle-ci s'est déjà engagée à améliorer les conditions d'attribution de visa de longue durée pour les opérateurs économiques.

La seule certitude tient du renouvellement de la convention de coopération scientifique entre l'Algérie et la France dont, en dépit de son indéniable intérêt, il sera difficile de faire le socle d'un nouveau dessein dans les relations entre les deux pays. Il est à craindre que le président français, tout à fait conforté dans une stature de VIP des grandes entreprises françaises par sa visite récente en Chine, n'ait pas réellement de grandes choses à proposer au partenaire algérien et qu'il ne s'en tienne à un numéro de communication dont il est aussi friand que familier. Certes, il sera encore question de cette «Union méditerranéenne», sortie opportunément du chapeau du président français, dont l'objectif à peine souterrain reste de barrer la route de l'Union européenne à la Turquie mais il sera difficile aux interlocuteurs algériens d'ignorer les graves propos islamophobes de Sarkozy devant des chefs de gouvernement européens rapportés sur le blog d'un quotidien parisien.

Cette visite d'Etat du président français -que les autorités algériennes préparent avec la plus grande attention- arrive-t-elle alors trop tôt ? Située au lendemain d'élections en Algérie et notamment à un moment où se re-profile une possible révision constitutionnelle mais aussi dans un contexte où mûrissent dans l'espace public algérien de sérieuses questions tant sur le rythme et les résultats des réformes économiques que sur les enjeux sociaux et démocratiques de ces réformes, il n'est assuré que cette visite ait l'ambition -et les moyens politiques- de l'accompagnement des mutations en cours en Algérie.

Pour le reste -les épineuses questions de sécurité et de lutte contre le terrorisme, de l'émigration clandestine, le dossier du Sahara occidental pour ne citer que ceux-là- les Algériens savent de main sûre toute l'importance des Etats-Unis avec lesquels ils s'attachent clairement à approfondir leur coopération.

Sankurunews