Monday, December 10, 2007

L'IMAGE TERNIE DES CASQUES BLEUS


09 décembre 2007

Visionnez un extrait du documentaire, Les Casques bleus

Longtemps leur nom a été synonyme de paix. On avait peut-être oublié que sous les casques symboliques, il y avait des hommes. Et que des hommes peuvent parfois dériver vers la barbarie.

C'est ce que dévoile un documentaire intitulé Le Déshonneur des Casques bleus.

La face cachée des missions de paix

Le film destiné à la télévision se penche sur le côté sombre de la présence des soldats de l'ONU dans les missions de paix.

La réalisatrice Raymonde Provencher s'est rendue en République démocratique du Congo (RDC) pour recueillir des témoignages. 20 000 Casques bleus avaient été envoyés là-bas en 2000 pour éviter un bain de sang. Mais nombre d'entre eux se sont livrés à des agressions sexuelles, violant des milliers de femmes et de jeunes filles.


Ces soldats étaient, pour la plupart, sud-africains, marocains et indiens. Quelques Occidentaux, cependant, ont aussi été reconnus coupables.

D'un documentaire à un autre

La réalisatrice raconte en entrevue que lors du tournage du documentaire War Babies, en 2003, les femmes bosniaques ont attiré son attention sur le comportement des Casques bleus.

Après avoir fait sa recherche, elle a découvert qu'il y avait eu un crescendo. Au départ, des cas plus ou moins isolés, que les Nations unies, dit-elle, ont mis sous le tapis. Les agressions ont continué.

Raymonde Provencher n'hésite pas à parler de « dérapages énormes » qui ont atteint un sommet en RDC.

Le docteur Arnold Kambale parle de plus de 5000 viols de fillettes. « Moi, en tant que médecin et parent, ça me ronge le coeur. J'en ai marre », dit le médecin congolais.

Des victimes et encore des victimes

Mme Provencher ne cache pas qu'elle s'est posé la question de la crédibilité des témoins. « J'ai été assez fortunée pour travailler avec quelqu'un qui avait des [relations] dans une église pentecôtiste, là-bas. » Elle a donc pu rencontrer des victimes.

Ce n'est pas une, deux ou trois. Il y a en a beaucoup. — Raymonde Provencher, réalisatrice

Elle a même dû faire un choix parmi toutes les victimes qu'elle a rencontrées. La quantité de témoignages des victimes était importante pour la réalisatrice.

Une, ça peut être un mensonge; deux, on peut encore douter. Mais cinq, puis dix, tu commences à dire: « Il y a quelque chose qui ne tourne pas rond ». J'avoue que j'ai été très choquée. — Raymonde Provencher, réalisatrice

Selon le Dr Kambale, les Congolais pensaient que les Casques bleus apportaient du secours. Mais il affirme que, après avoir constaté leur comportement, ils remettent en cause les idées qu'ils se font des Nations unies.

Raymonde Provencher ne craint pas qu'on l'accuse de racisme parce qu'elle affirme dans son film que des contingents de Casques bleus, qu'elle refuse d'identifier pendant l'entrevue, se sont livrés à des crimes inadmissibles. Selon elle, ces contingents proviennent de pays:

qui ont de la difficulté avec la démocratie;
qui ont de la difficulté avec les droits de la personne;
qui n'ont pas eu la possibilité de bien former les soldats.
Du même souffle, elle ajoute que, pendant tout le tournage, elle n'a jamais perdu de vue le comportement des militaires canadiens en Somalie.

Deux policières de Lévis en RDC

Une surprise attendait la réalisatrice en RDC. Elle a rencontré deux policières originaires de Lévis, au Québec, spécialistes des crimes à caractère sexuel. Les sergents-détectives Julie Filteau et Julie Plante faisaient partie de la première équipe d'enquêteurs envoyés en RDC par l'ONU. Elles n'ont pas eu la tâche facile, disent-elles.

Raymonde Provencher surenchérit en soulignant la complexité de la chose. « On arrive là-bas avec nos normes à nous. Sauf que, dans des pays où les gens savent à peine lire et écrire, ne connaissent pas très bien leur date de naissance, sont déplacés, sont très souvent des enfants, c'est extrêmement difficile. »

Tolérance zéro, héritage de Kofi Annan

Avec la tolérance zéro, mise en place par Kofi Annan avant son départ, Raymonde Provencher pense qu'il y a une possibilité de réaction assez rapide.

Elle rappelle que quelque 110 soldats sri-lankais viennent d'être rapatriés de Haïti pour agressions sexuelles.

« Je pense qu'on réagit, mais on n'agit pas ». Selon elle, il faut agir. Elle suggère que l'assemblée générale de l'ONU prenne des mesures disciplinaires sérieuses non seulement contre les soldats qui abusent de leur pouvoir, mais aussi contre leurs supérieurs.

Si le soldat dérape, le commandant doit être tenu responsable et sévèrement puni. — Raymonde Provencher, réalisatrice

Elle conclut en citant le cas de la prison d'Abou Ghraib, en Irak. Les soldats, dit-elle, ont été punis, mais les commandants sont à peine blâmés.

CDF Afrique à 22:51 - Congo (RDC)


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